vendredi 20 février 2009

23 février 2008

Vous vous souvenez de ce que je disais, l'autre samedi, à la fin de mon billet... qu'est-ce encore que de vivre, aujourd'hui. Pauvres de nous, pauvres de vous, pauvre de moi. Encore que. Le plus dur est largement derrière moi. Ce temps où, par la force des choses, je devais sacrifier la meilleure part de mon existence, l'essentiel de ce temps si précieux à me soumettre aux exigences de tel petit métier ou d'un autre encore. Maintenant, eu égard à mon âge - le troisième - il m'est possible de souffler un peu et n'avoir comme seule préoccupation que les méditations et réflexions qui me donnent cette chance de vous retrouver ici, chaque samedi à la même heure. Alors, certes, oui, j'ai du temps à consacrer à d'autres choses aussi: la lecture, l'amitié, les petites promenades dans le froid de cette fin d'hiver, les caresses prodiguées à mes deux chats, l'arrosage des quelques plantes qui ornent mes appuis de fenêtre sans oublier les quelques petits soucis liés à mon jeune fils et à ses études. Et pour le reste, de longues périodes d'oisiveté et de rêveries qui ne sont pas toujours roses. Car, d'avoir le temps pour penser amène aussi un autre regard sur les choses, les êtres, la manière d'appréhender ce qui arrive, ici ou là, dans le très lointain comme dans le très proche. Le temps que je puis consacrer à essayer de voir clair dans l'énorme flux de ce qui se donne à voir et à entendre, à observer et analyser est parfois le temps d'un profond désarroi, d'une inquiétude sourde et, aussi, l'occasion de moments où, pour un peu, je laisserai une sombre colère éclater. J'ai des envies, parfois, de me lancer dans des actions du type de celle qui a vu ce jeune-homme tenter d'étaler cette banderolle, à la façade de la Bourse de Bruxelles avant que d'être emmené par les policiers. Vous connaissez peut-être la suite de cette histoire: dans l'ascenseur qui le ramenait, l'audacieux s'est retrouvé nez à nez avec le directeur de l'édifice consacré aux dieux de la finance et, pour ce que j'en ai su, les deux hommes auraient échangé un long regard qui aurait décidé le maître des lieux à se fendre d'une carte blanche dans un journal de la capitale, à l'adresse du téméraire activiste. Dans laquelle il disait comprendre le geste et reconnaître l'audace de l'entreprise. Où il disait aussi que tout cela était bien romantique mais pourtant vain. Oui, il serait vain de vouloir s'opposer de la sorte aux sombres divinités de l'argent triomphant. Il paraît, en effet, selon le directeur, que le capitalisme est une donnée naturelle, consubstantielle à notre humanité et qu'il est puéril de vouloir contester une si frappante évidence. Donc, à l'en croire et si les mots veulent encore dire quelque-chose, le Capital, l'exploitation de tous par quelques-uns, l'économie politique qui est l'argument et le faire valoir de toutes les entreprises liées, de près ou de loin, à la sphère de l'accumulation et de la spéculation seraient aussi naturels que, par exemple, les deux yeux, les oreilles, le nez au milieu de la figure et j'en passe, de tout un chacun ? On va bientôt apprendre aux écoliers que les billets de banque poussent aux arbres, que les pièces de monnaies sont plus ou moins profondément enfouies dans le sol et qu'il suffit de gratter un peu pour s'en mettre plein les poches ? Et pourtant, j'arrive encore à rire et à faire rire, à l'occasion. Mais il m'arrive parfois de sentir qu'un bon gros sanglot ferait parfaitement l'affaire. Il y a quelque temps, ce reportage télé sur les gorilles des collines, quelque-part en Afrique, le regard de ce grand mâle, qui veillait sur la tribu, qui m'a bouleversé et mis les larmes aux yeux. Comme le mince croissant de lune, l'autre soir. Comme le sourire de l'amie...







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