lundi 9 mars 2009

12 avril 2008

L'autre jour, j'ai acheté un chou-fleur. Un chou fleur issu de l'agriculture biologique, s'il vous plaît, et, un peu plus tard, au moment de me mettre aux fourneaux, je l'ai regardé, le choux fleur. Pas très gros, plutôt petit, même, délicieusement arrondi, avec ses feuilles légères et délicates encerclant les rondeurs nuageuses que je m'apprêtais à détailler avant une cuisson à l'eau légèrement salée. J'avais déjà et souvent cette habitude de bien regarder les légumes, les insectes, les bourgeons, l'écorce des arbres, mes chats, les nuages au ciel. Mais pour cette fois, j'ai vraiment et longuement observé et je dirais même plus, contemplé les extraordinaires détails de ce légume devant lequel, en général, on passe distraitement et sans lui prêter le moindre intérêt ni attention. De la même façon que, la plupart du temps, on passe, indifférent, devant tant de petites et grandes merveilles, occupés que nous sommes à nous faire du soucis pour la fin du mois qui ne va pas tarder, la vaisselle à faire d'urgence, les factures qui s'accumulent, le huissier de justice qui attend sur la pas de la porte et autres sordides et mesquines pensées. Contempler. Voilà un beau verbe, voilà une saine, juste et indispensable manière de renouer avec tout cela qui nous entoure, voilà un geste proprement révolutionnaire. Quand l'air du temps – de plus en plus irrespirable - nous assène ses slogans ridicules, dans le genre “travailler plus et gagner des clopinettes”, “S'investir dans ceci ou cela”, “s'épanouir dans un job à la con”, il est bon, salutaire et tout à fait conforme à l'esprit de résistance d'opposer un mépris souverain et proprement aristocratique. Aristocratique, parfaitement ! Pas cette ridicule et pompeuse pseudo-aritstocratie des célébrités du star système de la finance ou de la politique qui occupent les premières pages des gazettes, non pas. Mais bien celle des esprits libres, de celles et de ceux qui, dans le dénuement matériel, dans le détachement volontaire, vont leur petit bonhomme de chemin sans faire de bruit, discrètement mais fièrement, un perpétuel sourire aux lèvres. Heureux soient celles et ceux qui caressent le dos du bourdon égaré, qui scrutent le ciel dans l'attente de la première hirondelle, du premier martinet. Bienheureuses soient les âmes floconneuses attentives aux premiers bourgeons, sanctifiées soient les plus minuscules manifestations de sympathie et d'amour pour l'universelle présence de la Vie. Et malheur et damnation pour ceux qui sont aveugles et sourds aux plaintes et aux cris de terreur qui montent du coeur du grand Tout du vivant martyrisé, sacrifié, trituré et manipulé au nom de la rentabilité et de la recherche, Vivant-marchandise, Vivant objet, Vivant en voie de disparition. En passant, salut et fraternité à ces quelques dizaines de promeneurs qui, dimanche dernier, arpentaient ces lieux enchantés, dans la région Liègeoise où, bientôt, sauf miracle, sur la simple signature d'un ministre de la région wallonne, le béton et des kilomètres de structures autouroutières prendront la place des prés, des arbres, des animaux de toutes sortent qui vivent là, peut-être, les premiers jours de leur dernier printemps. Saluons, aussi, l'extraordinaire projet de “Printemps de l'environnement” mis sur pied par le séduisant et sémillant Ministre fédéral en charge de ce dossier ô combien sensible. On peut s'attendre à de mirifiques et audacieuses mesures qui nous feront encore bien rigoler. Comme nous amuse de plus en plus une actualité qui témoigne du gigantesque et mirobolant spectacle de la déconfiture finale d'une époque qui, jusqu'au bout de sa navrante ambition à tout soumettre aux plus sordides impératifs, finira bien, dans la foulée, à mettre un terme à notre présence sur une planète que, finalement et tout bien considéré, nous ne méritions pas. Préparez vos mouchoirs, la fin approche.

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