mercredi 11 mars 2009

5 octobre 2008

Il y en a tout de même qui ont le talent pour vous mettre le nez dedans. Je pense à ce jeune metteur en scène allemand, Florian von Donnersmarck, auteur de cette sombre et édifiante histoire, «La vie des autres» qu'Arte rediffusait l'autre soir. J'avais stupidement manqué ce film au moment de sa sortie et je me félicite de ce que la chaîne franco-allemande ait eu la bonne idée de le programmer au moment où je me trouvais dans les meilleures dispositions pour en apprécier toute la portée. Pour rappel et brièvement, l'action se passe au début des années quatre-vingt, quand le bloc est-européen était encore sous la coupe de l'Empire soviétique et que l'allemagne orientale était, comme les autres alliés de Moscou, soumise à un régime et une caste, celle du parti communiste, qui défendait ses prérogatives et un prétendu socialisme avec le meilleur moyen qui soit, une police politique - la tristement célèbre Stasi. Laquelle avait pour mission de mettre rigoureusement au pas toute forme de contestation, d'où qu'elle vienne. En l'occurrence, ici, c'est le milieu du théatre, un auteur en particulier et sa compagne, comédienne, qui sont, sur ordre du ministre de la culture officielle, placé sous surveillance avec tous les moyens techniques que cette époque permettait et qui étaient déjà d'une redoutable efficacité. Qu'il soit vraisemblable ou non qu'un officier de la Stasi, en l'occurrence le capitaine Gerd Wiesler, ait pu se prendre de compassion pour le couple qu'il était chargé d'espionner et aller jusqu'à falsifier les rapports destinés à ses supérieurs n'entre pas en ligne de compte. La leçon de ce film, selon moi, est à trouver dans les faits qu'il dénonce et que, naïvement, vous pourriez penser qu'ils ne sont que de ce temps et de ces contrées. Le sénat romain avait ses délateurs, qui signalaient à l'Empereur les agissements des intrigants qui menacaient son autorité et son prestige, les royaumes de France avaient leur police et leurs mouchards, Napoléon était servi avec abnégation et redoutable efficacité par le sombre Joseph Foucher, le sinistre Béria avait instiué la gépéou sur ordre de Staline et le régime nazi la gestapo, dont nombre d'officiers rescapés de la débâcle du troisième Reich se retrouvèrent dans la stasi. Tout état constitué, tout régime politique qu'il soit autoproclamé démocratique ou non, a pour ambition de durer et cette ambition se traduit par la mise en place d'une foule de services et de structures de coercition plus ou moins officielles qui tous poursuivent un même objectif: faire taire et au besoin éliminer de mille façons toute forme de remise en cause d'un état des choses qui se berce de l'illusion de durer toujours. Et si les méthodes divergent quelques fois, si d'une époque à l'autre les moyens mis en oeuvre sont plus rigoureux et se transforment en terreur, le but reste le même et se traduit par la même et universelle volonté de tenir les foules sous une suspicion permanente. Pour le dire autrement, le vulgum pecus, le vulgaire n'a pas à mettre son nez dans les affaires des états, les élus ou les tyrans n'ont de compte à rendre qu'à eux mêmes. Au reste, la marche du monde est entre les mains du marché, ce fantôme commode et capricieux dans l'ombre duquel des hommes de chair et de sang s'adonnent à la folie de l'argent. Et cela au risque de faire sauter la planète, de la mettre à feu et à sang, ou de la laisser aller à l'empoisonnement généralisé, elle et ses malheureux milliards de zombis gagnés par la même fièvre de l'expansion infinie dont se rengorgent les managers et les classes politiques, toutes tendances confondues. Mais finissons par une note plaisante: il a neigé sur mars, nous apprend-t-on. Qu'on y expédie donc les parachutés dorés faire du ski. Et qu'on en soit débarrassé...


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