mercredi 11 mars 2009

8 décembre 2007

Vous connaissez la dernière ? Il y a un type, au Ministère Wallon de l'équipement et de je ne sais plus quoi qui s'est mis en tête de vouloir supprimer les bonnes vieilles baraques à frites que l'on trouve sur les petites routes de la campagne de chez nous, au motif qu'elles représenteraient un danger pour la circulation. C'est lundi dernier, en prenant l'apéro et en feuilletant la gazette locale que cette nouvelle m'est tombée sous les yeux et je ne doute pas un seul instant que vous en mesurez, là tout de suite, toute l'importance voire même le caractère proprement historique. Force est bien de reconnaître les risques majeurs auxquels les malheureux automobilistes sont confrontés aux alentours de ces lieux, d'où s'échappent les effluves de frites plongées dans la graisse chauffée à environ 180 degrés, effluves qui vont sans vergogne se loger dans les fosses nasales des conducteurs de 4x4 ou de modestes berlines brinquebalantes, sans parler de celles des femmes et des enfants d'abord, qui se mettent à réclamer leurs cornets de frites mayonnaise à corps et à cris. Vous imaginez sans peine le coup de frein brutal, la marche arrière intempestive, quand ce n'est pas le dérapage sur flaque de sauce tartare inopinément répandue sur la chaussée par un touriste hollandais distrait par la beauté du paysage. Donc, les baraques à frites, fini, terminé, rayées de la carte; silence le petit peuple, tout ça c'est pour votre bien, votre sécurité, votre santé et votre intégrité physique. Remarquez, je n'ai rien contre le fait que l'état et les gouvernements locaux se soucient du bien-être des citoyens que nous sommes et que, dans ce but, tel ou tel responsable prenne sur lui d'aménager au mieux l'environnement par nature hostile qui est le nôtre. Et que des lois, des décrets, des directives soient mis en oeuvre pour garantir une relative harmonie dans les rapports que nous entretenons les uns avec les autres, me paraît aller de soi. Le problème, car problème il y a, c'est que les bonnes intentions de quelques-uns, les réelles innovations des autres se voient imanquablement transformées en leur contraire dès lors que survient un changement notable dans la composition des assemblées. Un ministre a voulu ceci et l'a obtenu, le suivant, d'un autre parti et pour de nouvelles raisons, défait ce qui était acquis et à quoi on s'était résigné et met en chantier une autre réforme. C'est ainsi que, de changements en changements, de disputes en chamailleries, d'avancées en reculades dans à peu près tous les secteurs de la vie publique et privée, on en arrive à voir des majorités chahutées, des gouvernements perdre la confiance des citoyens, des crises de plus en plus aiguës ronger les fondements des simples habitudes et coutumes qui, jusque là, faisaient l'affaire du plus grand nombre. Mais le plus grave, on peut le constater aujourd'hui, c'est quand la sphère politique et ses représentants se voient désavoués et perdre tout crédit aux yeux de ceux qui les avaient élus. Devant l'impéritie des uns et des autres, de quelque sensibilité qu'ils se réclament et à de très rares exceptions près, il est de plus en plus manifeste que les néo-citoyens de ce pays en sont aujourd'hui à considérer que l'on se moque d'eux. Et que la colère, larvée encore et diversement exprimée, est bel et bien là. Et elle peut s'avérer bien plus dangereuse, pour tous les pouvoirs, que la lassitude ou le désenchantement. A Louis le seizième, inquiet des troubles dans Paris et qui se demandait s'il s'agissait d'une révolte, il fut répondu: non, Sire, c'est une révolution. Le même Louis Capet notait dans son journal, le 14 juillet 1789, jour où fut prise la Bastille: aujourd'hui, rien.



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