mercredi 11 mars 2009

26 octobre 2008

S'il est bien une chose qui me ravisse absolument dans le fait d'aller au cinéma, c'est de m'installer dans une salle pas trop grande, avec pas trop de monde (les séances de l'après-midi, représentent l'idéal en cette matière) et avec juste ce qu'il faut d'avance sur l'horaire que pour jouir pleinement de cette attente dans la pénombre propice. C'est une attente délicieuse. Les sens sont en éveil; les yeux parcourent l'espace à peine éclairé par de petites ampoules, il y a la musique, souvent insipide, un grand calme autour de soi, si ne ne sont quelques légers chuchotements à gauche ou à droite, on se prend à rêvasser en attendant les bandes annonces (ça j'adore, les bandes annonces !) et de petites pensées parfois incongrues font des vaguelettes à la surface du cerveau. Tel moment particulier du jour d'avant, fragments de souvenirs lointains qui surgissent à l'improviste, chanson désuette qui se met à résonner aux oreilles sans prévenir, on est dans le plus parfait abandon jusqu'à ce que le noir s'installe et que les premières images apparaissent. Mais comme il est peu raisonnable de se déplacer quotidiennement pour goûter à ces menus plaisirs, il est parfaitement possible, chez soi, de se détacher, ne serait-ce qu'un peu, des contigences de toutes sortes qui nous éloigne de nous mêmes. C'est un exercice pour lequel je suis particulièrement doué. Aucun bruit de fond, ni radio, ni musique, mes appareils auditifs sont sagement rangés dans le tiroir idoine et les sons du dehors ne me parviennent qu'étouffés et feutrés, je traînaille pendant de longues minutes avant de me décider à passer à la salle de bain pour mes ablutions matinales, les déplacements lents et silencieux des chats sont comme des nuages à quatre pattes effleurant le plancher de plastoc, la lumière du dehors est filtrée par les tentures fermées. Je sirote mon ennième breuvage café-chicorée bien sucré, j'en suis à ma quatrième cigarette et je ne suis pas loin d'un état proche de celui que connaissent les praticants du yoga ou de la méditation transcendentale. Oui, bon, d'accord, j'exagère un tout petit peu... les adeptes de la position du lotus sont raisonnables, ils ne fument pas et ne mettent pas de sucre dans leur thé au jasmin, ils mangent plutôt des trucs bio et font du jogging le dimanche matin. Je n'ai rien contre le bio, sois dit en passant. Mais enfin, c'est plutôt quand ça se trouve et que je passe du côté de chez Paul, place du xx août. Au reste j'affectionne les promenades à pas lents plutôt que la course à pied, avec arrêts fréquents pour admirer telle façade ou tel arbre aux feuilles aussi rousses que la tignasse de Lauren Bacall, ou longue station sur un banc public, le temps de m'en rouler une petite avant de repartir avec la même nonchalance. Ce n'est pas bien raisonnable, mais soit. Vous aurez remarqué que les réclames pour les barres chocolatées et autres boissons qui font Pschit sont, à chaque fois, à la télé, accompagnée d'un bandeau qui indique qu'il faut manger trois légumes et trois fruits par jour. C'est un excellent conseil. Pour autant que l'on ne perde pas de vue qu'ils sont bourrés à fortes doses de pesticides et autres substances hautement toxiques. L'air que nous respirons ne vaut guère mieux et des enquêtes récentes et concordantes montrent que 25 à 40 % des décès dans le monde dit civilisé sont dût à notre environnement, au sens le plus large. Je vais donc me décider à manger les trois petites poires de chez Paul avant qu'elles ne se transforment en compote à l'insu de leur plein gré, c'est toujours ça de pris. De toute manière, aliment ceci ou cela, au bout du compte, il faudra bien en passer par notre dernière heure. Bien sûr, il est préférable de mourir en bonne santé que très malade mais n'en faisons pas toute une affaire, non plus. Vivre, c'est, chaque jour qui passe, mourir un peu. En attendant, soyons légers; buvons, rions, chantons et, surtout, aimons. C'est, selon moi, la meilleure alimentation qui soit...


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