dimanche 8 février 2009

13 janvier 2001

Etrange coincidence, l'autre soir, deux chaînes de télévision dont l'une consacraient une partie de la soirée à cette période de l'entre-deux guerres qui continue et c'est heureux, je veux le redire, à hanter les mémoires. D'un côté, on relatait, images d'archives à l'appui l'extraordinaire développement du commerce des armes, activités lucratives s'il en est et qui a permis à de prestigieuses familles d'industriels et leur descendance de se mettre à l'abri du besoin. Tous les continents et la plupart des grandes nations modernes ont ainsi participé à la courses aux armements et, de la sorte, ont permis que des Etats, des régimes, des révolutions de palais ou vaguement populaires, se lancent dans des affrontements sanglants qui ont faits des dizaines de millions de morts. De l'autre côté, il était question du rôle que le régime de Vichy a joué dans le recensement, le rassemblement, la déportation et, finalement l'extermination des juifs français et étrangers installés en France, parfois depuis de longues années et qu'est-ce-que ça change, nom de dieu. Et Vichy cétait Pétain, cette vieille ganache puritaine, mais c'était aussi, Bousquet, Papon, Laval et autres crapules qui écrivaient les pires horreurs dans des torchons qui étaient lus non seulement en zone dite libre mais aussi dans la France occupée. Et à propos de chasse à l'indésirable, il m'est difficile de ne pas faire le rapprochement avec le sort réservé à la plupart de ceux qui s'en vont de chez eux dans l'espoir, monnayé à prix fort, de trouver dans nos contrées hospitalières, un peu, un tout petit peu de chance d'échapper à la persécution, à la misère et, dans les cas extrêmes, à la mort. Je me souviens du témoignage, à la fin des années trente, de Marcel Thiry, écrivain et père de Lise, que vous connaissez, qui est de tous les combats pour la dignité, le respect et la compassion pour ceux, et ils sont nombreux, que ce monde pourri lance sur les routes ou sur les flots et que l'on réexpédie chez eux, les mains entravées par des menottes, à bord d'avions d'une compagnie aérienne qui s'appelle «honte à vous». Marcel Thiry, raconte, dans un article publié ˆ l'époque où les juifs d'Allemagne, d'Autriche, de Tchécoslovaquie ou de Pologne, fuyaient, pour les meilleures raisons du monde, des lieux infestés par la bêtise et la cruauté, se présentaient à nos frontières, oui, oui, les frontière de cette Belgique toujours grande et belle et se voyaient refoulés par les douaniers et les gendarmes qui faisaient, qui ne faisaient que leur devoir, comme ils le font aujourd'hui. On me dira que ce n'est pas la même chose, que le nazisme a disparu, qu'Hitler, Goebbels et Himmler sont mort depuis longtemps et qu'on ne peut comparer le sort fait aux juifs d'Europe en ce temps-là à la condition des candidats réfugiés qui viennent jusque dans nos campagne dans des centres de transit plus ou moins fermés en attendant que l'on statue - de la liberté - sur leur sort. Certes ce n'est pas tout à fait la même chose et les centres de Vottem ou de Stenokerzeel n'ont aucune ressemblance avec les camps de la mort de Treblinka, Dachau ou Auschwitz. La question n'est de toute façon pas là. Ce qui est en cause c'est un principe et une philosophie dont se réclame officiellement un Etat comme le nôtre et qui ont partie liée avec la fameuse déclaration universelle des droits de l'homme d'où qu'il vienne, quelle que soit la couleur de sa peau, sa religion, sa langue et ses coutumes. De ce principe et de cette philosophie on fait ce qu'on veut en fonction des circonstances et on n'a pas fait tant de manières quand il s'est agit, juste après la guerre, de déplacer des milliers d'hommes d'Italie et de Sicile, très officiellement et dans les règles du commerce, à seule fin de les foutre au fond de nos mines de charbon, qui ont rapporté beaucoup à leurs propriétaires. Il y a, dans mon entourage, des Marcello, des Daniella, des Gian-Carlo, des Caterina, des Olindo, des Lino, et des Carmello qui ne sont pas des brutes sauvages, bien au contraire et qui sont les enfants des mineurs dont la plupart sont morts depuis longtemps d'avoir respiré, pour que nous puissions nous chauffer l'hiver, la poussière de houille qui n'a rien à voir avec l'air de la Toscane ou de la Vénitie.



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