jeudi 12 février 2009

21 février 2004

Je vais vous faire un aveu: ce n’est pas que je me réjouisse ou que je puisse avoir la moindre tentation de brusquer les choses mais, par certains côtés, je crois bien que je serais plutôt soulagé quand viendra l’heure de m’en retourner à la poussière originelle. Et je ne comprends pas que tant de gens attachent autant d’importance à leur insignifiante personne au point de redouter la maladie, la vieillesse et le terme, de toute façon inexorable, de leur passage en ce très bas monde. Parlons-en, du monde. J’ai eu sous les yeux, des passages d’un rapport d’experts remis récemment au Premier Ministre français, Jean-Pierre Rafarin. Rapport qui fait l’état des lieux en matière d’environnement en général et des multiples et catastrophiques pollutions engendrées par nos industries, nos voitures, notre alimentation, notre agriculture enfin, par ce fameux progrès dont on nous assurait, au siècle dernier, qu’il allait libérer l’humanité des fléaux de la misère, de la maladie, de la guerre et autres calamités. Je vous épargnerais les détails, d’autant que je ne les ai pas sous la main mais, juste pour vous donner un exemple, sachez que le nombre et la variété des cancers, en France, juste à côté de chez nous, donc et il n’y a pas de raisons que cela soit très différent de part et d’autre d’une frontière qui n’est pas imperméable aux gaz et aux émanations de toutes natures; que les cancers,donc ont augmenté de plus de trente pour cent en à peine vingt ans. 200.000 cas de cancers mortels parmi lesquels 30.000 dûs au tabac. Cela nous en fait 170.000 qui ont des causes qu’il reste à expliquer autrement qu’en essayant de foutre la trouille et culpabiliser ceux qui, comme moi, prennent du plaisir à tirer sur leurs clopes ou leurs cigares. Dans tous les pays industrialisés, le même phénomène est attesté et les ravages ne risquent pas d’aller en diminuant puisque, partout, on n’en continue pas moins à courir après une croissance dont on n’ose pas regarder en face les terribles et bientôt irréversibles conséquences. Sans compter avec cette stupide affirmation de ceux qui continuent de prétendre que seule la croissance est, à terme - mais un terme qui va toujours en s’éloignant - seule garante d’un plus juste partage des richesses qu’elle engendre. Et à ce sujet, en France toujours, une étude récente fait apparaître que plus d’un million d’enfants vivent sous ce qu’on nomme pudiquement le seuil de pauvreté. Et leurs parents, seuls ou en couple avec, bien évidemment. Des dizaines de milliers de gens vivent dans des conditions proprement scandaleuses au milieu de l’étalage imbécile et vulgaire des images d’un bonheur garanti par la consommation de tout et de n’importe quoi. D’une certaine manière, il y a tout de même une justice, si j’ose dire; que l'on ait accès aux signes extérieurs d’une abondance factice, que l’on puisse dans l’allégresse et l’insouciance courir les magasins de fringues ou non, au bout du compte, les plus ou moins favorisés par le sort et les autres vivent dans un même monde. Un monde qui, pour tous, les bienheureux nantis comme les autres devient de plus en plus irrespirable au sens strict du terme; un monde que, de toute manière, il nous faudra quitter un jour, plein aux as ou fauché comme les blés. Et si je peux parfaitement comprendre et partager les angoisses quotidiennes de ceux qui doivent tout calculer au centime près, si je sais fort bien ce que sont les fins de mois difficiles, si ma position sociale est loin d’être celle d’un rentier égoïste et mesquin, je n’en n’éprouve ni rancoeur ni regrets, bien au contraire. Ne rien posséder que le strict nécessaire, se garder des vains désirs, accepter en souriant la claire et douce successions des jours, se réjouir à chaque minute qui passe d’avoir encore le privilège d’être tout simplement là, voilà ce qui me paraît-être le seul chemin, un chemin qui ne mène nulle-part et partout à la fois...





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