lundi 9 février 2009

15 mars 2003

Comme de bien entendu, mercredi dernier, j’étais parmi la cinquantaine de milliers de personnes qui arpentaient les boulevards de Liège à l’occasion de ce grand rassemblement où se mélangeaient les ouvriers de la sidérurgie, les employés des banques et des assurances, les représentants des services publics et j’en passe, enfin, toutes celles et tous ceux qui, d’une manière et d’une autre, se sentaient directement ou indirectement concernés par l’actuelle situation de cette belle et fière cité menacée d’extinction, tout simplement. Vous imaginez bien que je ne pouvais rester calfeutré entre mes quatre murs à ruminer et me morfondre et que ma place était là, aux côtés de quelques vieux camarades, perdus, comme moi, dans une multitude que personne n’attendait. Car une chose est claire, aucun des organisateurs de cette manifestation n’aurait parié sur un tel déferlement de gens venus de Liège, bien sûr, et de toute la province, mais aussi de Flandre, de Charleroi, de Namur, de France et d’Allemagne. Il y a, dans ces manifestations - et j’en ai connu pas mal, sur une bonne trentaine d’années - quelque chose qui s’apparente à la communion, si vous voulez; car, au delà de la vie de chacun, à ses problèmes particuliers, à sa situation dans le grand corps social, l’espace de quelques heures, il se trouve immergé dans une atmosphère, un climat qui fait que les visages qu’il croise, les sourires qu’il échange avec des gens qui lui sont parfaitement inconnus, les paroles qui fusent spontanément, lui font voir que son destin individuel n’est que relatif, qu’une vaste communauté de femmes et d’hommes l’entoure et que tous ceux-là, qui marchent en se tenant le bras, qui crient, chantent et conspuent, partagent avec lui un destin commun, un destin auquel chacune et chacun participe avec ses singularités qui, pendant une matinée, s’estompent, pour se fondre dans une conscience plus vaste, qui transcende l’étroite appartenance à soi-même, sans pour autant la nier, mais, bien plutôt l’ouvrir à l’altérité. Oui, nous participons toutes et tous à une destinée commune; de cercles en cercles, nos actions, nos pensées, nos sensibilités, nos choix sont intimement liés à celles de tous les autres, ici, dans cette ville mais aussi, bien plus loin, dans le vaste monde que nous occupons et devrions partager plutôt que nous en disputer la propriété. Laissez moi vous dire que je n’entends pas que philosopher puisse seulement signifier l’enfermement dans les sphères lointaines de la métaphysique; il s’agit aussi de ne pas perdre de vue que nous avons à vivre et que vivre ce ne peux pas être seulement vivre pour soi mais vivre dans la recherche et l’affirmation d’un ordre, d’une harmonie qui ne peut que tendre à l’universel. Il est à remarquer qu’une fois encore, à l’occasion de ce rassemblement, les responsables politiques ont étés la cible de huées et autres quolibets; qu’ils sachent que ce n’est pas le fait du hasard; les gens sentent bien qu’à de trop nombreux égards ceux qu’ils ont élus manquent à leurs devoirs, que de trop nombreuses zones d’ombres entourent les décisions qui sont ou ne sont pas prises, localement ou au niveau des Institutions Européennes. Parmi les citoyens de cette région, de ce pays, de l’union qui veut les rassembler, nombreux, de plus en plus nombreux sont ceux qui perdent confiance dans la réelle capacité et volonté de leurs élus à influencer l’implacable logique d’un marché souverain et arrogant. J’en viens à rêver d’une Internationale Citoyenne qui, au delà de tous les clivages et de toutes les frontières, rassemblerait les membres d’une nouvelle alliance dont l’objectif premier serait de jeter les bases d’une autre mondialisation, fondées non plus sur la lutte stérile entre les puissants pour dominer le monde mais sur la conscience que c’est toute l’humanité et tous ceux qui la compose qui est à prendre en compte et qui vaut toutes les luttes à venir. Aux armes, citoyens !...



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