dimanche 8 février 2009

23 juin 2001

Bonne nouvelle, cet après midi, nous allons au cinéma, elle et moi et je pourrais, la semaine prochaine, à la veille des vacances, les vôtres et les miennes, vous parler d’un vrai film de cinéma; il s’agit de la dernière en date des prestations de notre Benoît Poelvoorde dans “Les portes de la gloire”; au vu de la bande annonce tout ça m’a l’air plutôt croquignolesque et nous nous réjouissons d’être devant le grand écran blanc en attendant que le film commence... Mais pour l’heure je vous propose un voyage en Chine, car, voyez vous je suis tombé, tout à fait par hasard, sur un documentaire absolument remarquable diffusé sur cette non moins remarquable chaîne qui brille par l’intelligence de sa programmation et par le fait qu’elle ne considère pas, à priori que les téléspectateurs sont nécessairement des débiles mentaux, ça fait plaisir, merci. L’histoire se passe dans le petit village de Gaosing, dans la province de Guizou, là où vivent les Dong, les Dong, si vous voulez, c’est un peu comme par chez nous où l’on trouve des Wallons, des Picards, des Bretons et des Franc-Comptois qui ont une langue commune mais qui se distinguent par quelques particularismes qui font que, par exemple, il est difficile de ne pas savoir tout de suite qu’on à affaire à un méridional à la manière avec laquelle il réclame son pastis. Donc, les Dong sont Chinois mais ils sont aussi Dong et ils vivent comme des Dongs, avec des traditions, un mode de vie, des habitudes qui les distinguent de leurs cousins de Shangaï ou d’ailleurs dans cet immense pays. Le problème, pour les habitants de Gaosing, c’est la tour du tambour qui se dresse au milieu du village, qui a beaucoup souffert du temps qui passe et des exactions commises par les gardes rouges du temps de la révolution culturelle. C’est une tour en bois, construite il y des centaines d’années par les ancêtres du village et son état de délabrement est tel que les villageois décident, collectivement, d’en ériger une nouvelle; les réunions se succèdent dans l’espace situé au pied de la tour où les anciens et les jeunes passent de longues heures à discuter de comment et sous la direction de qui se lancer dans l’entreprise. Finalement, on se met d’accord pour confier à Hou, le maître charpentier du lieu, le privilège de concevoir le futur édifice dont la forme, la hauteur et les caractéristiques font l’objet d’autres réunions paisibles, toujours au même endroit. Je vous passe les détails mais notez que Hou se passe d’architecte, qu’il ne dessine aucun plan de son ouvrage, que les dimensions de tous les éléments de la charpentes sont conçus en grandeurs réelles à l’aide de gabarits qui sont faits de longs morceaux de bambous sur lesquels il trace les repères des endroits où seront fixés toutes les traverses qui partiront des quatres énormes poteaux qui constitueront l’élément central de l’édifice. Des équipes partent dans la montagnes choisir et abattre, selon la tradition, les cèdres qui poussent par centaines de milles sur les flancs des imposantes collines et, notez le bien, aucun engin motorisé, ni grue, ni quoi que ce soit de mécanique n’est utilisé dans cette entreprise et le levage des poteaux, autour de ce qui reste de l’ancienne tour et qui constitue l’échafaudage se fait à la main et l’on voit tous les hommes valides du village lever et pousser les énormes pièces de bois, qui pèse chacune plusieurs tonnes et les mettres en place avec force cris d’encouragement. En trois mois la tour de six niveaux et haute de plus de vingt mètres est achevée et, le jour de l’inauguration, les femmes du village revêtent les costumes traditionnels, les anciens font de même et la fête dure toute la journée et se prolonge tard dans la soirée. Je tenais à vous raconter cette histoire simplement parce que elle est, à mes yeux, exemplaire en ceci que les habitants de Gaosing sont tout à fait capables de réaliser leur projet sans aucune aide extérieure et d’ailleurs ils ne la supporterait pas, en mettant en oeuvre les talents et les compétences de chacun, sous la direction d’un des leurs, qui a été choisi pour ses qualités, qui est naturellement écouté et respecté et dont la modestie n’a d’égale que son extraordinaire savoir faire; il y a là dedans bien des choses dont nous pourrions nous inspirer et pas nécessairement pour construire une tour...


Aucun commentaire: