dimanche 8 février 2009

30 décembre 2000

Peut-être avez-vous entendu parler de ce film, hollywoodien, évidemment, qui relate les prétendus exploits d’une poignée de héros, américains, bien sûr qui, en pleine deuxième guerre mondiale ont pris d’assaut un sous marin allemand pour, si j’ai bien compris, prendre possession de codes secrets utilisés par la marine de guerre nazie. Or, il se fait que ce film a très sérieusement irrité les sujets de sa gracieuse majesté la reine d’Angleterre puisqu’il est avéré que ce sont des soldats britanniques qui ont accomplis ce haut fait d’arme et non pas les neveux de l’oncle Sam. Comme quoi, avec un peu d’astuce et un fameux culot, on peut ainsi travestir la vérité historique et balancer au public les mensonges les plus éhontés. Et comme le commun des mortels ne lit pas nécessairement “Le monde” ou les “Cahiers du cinéma”, il va se trouver, aux Etats-Unis et ailleurs, des milliers de gogos pour croire dur comme fer que décidément les Amerlocks sont vraiment des mecs fortiches et que sans eux on en serait pas là où on en est. Ce qui est vrai par certains côtés, j’en suis parfaitement d’accord. A propos de vérité historique et d’Histoire tout court, je suis tombé, tout à fait par hasard, en visitant une brocante de vieux bouquins d’occasion, sur un document tout à fait intéressant; il s’agit du “Livre jaune français” publié à la veille de la deuxième guerre mondiale et qui est, en fait, la transcription, quasiment au jour le jour, des échanges diplomatiques entre les différents ambassadeurs de France en poste à Berlin, Varsovie, Prague, Londres, Moscou et Washington et le ministre des affaires étrangère de la République. Ce receuil relate, au travers du nombreux courrier échangé par les différents émissaires et leur Ministre, les dramatiques épisodes d’une des périodes les plus troubles de l’histoire moderne qui s’ouvre sur l’accord austro-allemand, signé le 11 juillet 1938, par lequel l’Allemagne reconnaît la souveraineté et l’indépendance de l’Autriche et qui se termine par l’appel à la Nation d’Edouard Daladier, Président du Conseil, le 3 septembre 1939, deux jours après l’entrée des troupes allemandes en Pologne. Il est tout à fait passionnant et, en même temps, très émouvant d’être ainsi le témoin des efforts incessants des démocraties occidentales en vue de sauvegarder la paix et de faire barrage aux ambitions démesurées des dirigeants nazis et de celui qu’on appelle alors, dans le langage diplomatique“Monsieur le Chancelier”. Mais le plus instructif dans tout cela et qui reste valable aujourd’hui, c’est de se rendre compte, au travers de la phraséologie et du style en vigueur dans les échanges internationaux, des nombreux avertissements et mises en garde qui émanent, par exemple, des messages qui, de Berlin à Paris, rendent compte de l’état d’esprit et du véritable visage des maîtres du IIIéme Reich et, en particulier, de celui d’Adolf Hitler dont on ne pourra pas nier sérieusement qu’il a été scrupuleusement tracé par les deux ambassadeurs qui se sont succédé à Berlin en l’espace de quelques mois. Un portrait qui, hélas, aura échappé à ceux qui, comme mes parents et leurs contemporains, s’adonnaient aux menus plaisirs que cette époque permettait; on allait au bal le samedi soir, on découvrait le cinéma américain et puis, aussi, aux actualités, on voyait les grands de l’Europe d’alors réunis à la conférence de Munich, Mussolini, Chamberlain, Hitler et Daladier, signant les accords qui retardaient de quelques mois la guerre à laquelle on préférait ne pas penser. Dans le secret des cabinets, pourtant, tout était clair, mais on gardait ça pour soi. Il y a des choses que le peuple souverain n’a pas à savoir. Et si vous croyez que les choses ont beaucoup changé depuis ce temps là, permettez moi de ne pas partager votre optimisme. Dans tout ce qui touche à notre survie, à notre intégrité, à notre avenir, dites-vous bien que pas mal de secrets sont jalousement gardés et que ceux qui en disent trop sont réduits au silence, d’une manière ou d’une autre. Les méthodes sont un peu moins brutales, peut-être, mais le résulat est le même: notre vie ne nous regarde pas...





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